Certains se souviennent sans doute du film de Bernardo Bertolucci, Le Dernier Empereur (1987), dans lequel l’impératrice douairière Cixi (1835-1908) abuse d’un titre usurpé. Certes, l’ancienne concubine a donné naissance à l’empereur Tongzhi et fut co-régente de l’impératrice douairière Ci’an, avant de la faire elle aussi disparaître fort opportunément… Mais, si l’exposition Wu Zetian lui est en partie consacrée, ce n’est pas elle qu’on nomme L’unique impératrice de Chine.
Après l’unification du pays, en 210 avant l’ère commune, des centaines d’empereurs ont régné sur la Chine. On en dénombre ainsi 451. Leurs épouses, c’est-à-dire les impératrices officielles, ont presque toujours joué un rôle subalterne, comme ce fut le cas de toutes les femmes dans la Chine ancienne. Les empereurs s’entouraient aussi d’une kyrielle de concubines, toutes sélectionnées pour leur beauté. Le lieu de naissance de Wu Zetian, ou Wu Zhao comme elle s’appelait en réalité, n’a jamais été confirmé. Trois endroits entrent en ligne de compte, même s’il n’était jadis pas jugé utile de déclarer avec exactitude la naissance d’une fille. Selon le calendrier international, Wu Zhao serait née en 624, d’un père nommé Wu Shiyue qui fut d’abord marchand de bois, puis assuma les fonctions de commandant de l’armée et même de ministre. Il eut deux fils de son premier mariage. Sa seconde épouse, qui entretenait des relations étroites avec la cour, lui donna trois filles. L’empereur Taizong, au pouvoir depuis 626, se montra généreux envers Wu Shiyue et rendit maintes fois visite à la famille Wu. Lors d’une de ces visites, il fut subjugué par la beauté extraordinaire d’une des filles de la maison. Comme il fallait se soumettre aux volontés impériales, à l’âge quatorze ans, la jeune fille rejoignit les rangs des concubines. Par son intelligence, elle parvint à exercer des fonctions de secrétaire et reçut de l’empereur le surnom de Wu Mei ou ‘‘glamoureuse’’. Sur les portraits existants, elle se montre avec un visage gonflé et n’est guère jolie, suivant nos critères actuels. Mais ces portraits furent réalisés à la fin du XVIIe siècle, bien après sa mort. La notion de beauté n’a, en outre, cessé de varier au fil du temps. Une chose est sûre cependant, si Wu Mei eut, en qualité de concubine, des relations sexuelles avec l’empereur, elle ne lui a jamais donné d’enfants.