Dans cette série, COLLECT s’intéresse à la place occupée par les jeunes artistes dans le monde contemporain. Pourquoi ont-ils choisi cette voie, d’où leur vient leur inspiration et comment se positionnent-ils ? Ce mois-ci, c’est le tour de Clara Spilliaert (1993).
À l’âge de sept ans, Clara Spilliaert réalisait pas moins de 4.500 dessins rassemblés dans 62 carnets intimes. Elle les conserve précieusement dans sa chambre, à l‘intérieur d’une boîte. Ces scènes révèlent les émotions occasionnées par son déménagement de Tokyo vers la Belgique, lorsqu’elle avait seize ans. Ces dessins illustrent parfois le besoin de communiquer dans une langue inconnue, mais plus souvent ils sont les témoins silencieux d’une quête approfondie du sens de l’identité, des liens familiaux et de la sexualité : « Certains sont oniriques, d’autres plutôt bruts. En étroite collaboration avec MER.Books, j’ai réalisé une série de 240 illustrations pour la revue Sekirara, qui signifie littéralement ‘‘nu à l’extrême’’ en japonais. C’était la seule manière pour moi de faire connaître ces œuvres très personnelles. Elles sont le fruit de longues années de recherche. Le dessin est, à mes yeux, synonyme d’intimité. Il fait donc moins partie de ma pratique artistique publique. Chaque fois qu’un événement provoque en moi une émotion forte, par exemple notre superbe treille coupée récemment par nos voisins et qui depuis meurt à petit feu, je reprends mon crayon. Dessiner m’offre un refuge pour mieux canaliser mes émotions. Ces recueils de dessins sont, à la fois, une source d’inspiration inépuisable pour d’autres œuvres. La sincérité des films tirés des journaux intimes de Jonas Mekas m’interpelle beaucoup. » Quelques années après avoir étudié le dessin à l’école LUCA de Gand, Clara Spilliaert s’est lancée dans des études de céramique : « J’ai obtenu mon diplôme grâce à une fontaine en porcelaine, ce qui m’a permis de découvrir l’atelier de céramique de l’école. Depuis, j’ai eu envie de créer des objets tridimensionnels, un nouveau monde s’étant ouvert à moi. Contrairement à mes dessins intimes, mes sculptures peuvent vivre leur propre vie. Depuis la fin de mes études, en 2021, demandes d’expositions et commandes pour l’espace public se multiplient. Avec l’exposition chez Keteleer, je fais mon entrée dans le monde des galeries. Même si la vie n’a pas toujours été rose, je suis heureuse d’avoir pu me révéler, durant ces dix années, en tant qu’être humain et artiste. J’ai aussi le sentiment que la galerie va me donner la liberté et la confiance pour évoluer comme je l’entends. J’espère qu’elle facilitera les contacts avec les collectionneurs, car j’aimerais partager l’histoire qui se cache derrière mes œuvres. »